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Livre du mois : Les neiges bleues de Piotr Bednarski

« Nous étions toujours affamés, loqueteux, pleins de poux. La boule tondue à zéro, aux ciseaux et non à la tondeuse, donc en marches d’escalier, et nos têtes avaient l’apparence de pyramides mal bâties. Nous portions des culottes de cheval militaires, toujours trop grandes, qui nous arrivaient presque aux aisselles. Chacun les ajustait tout seul et de son mieux selon ses besoins… L’important était que les jambes puissent bouger librement et jouer à tout moment leur rôle… »

« Nous n’avions conscience ni de notre misère ni de la mort omniprésente. C’était notre monde, notre réalité, notre quotidien. Nous n’avions rien connu d’autres ou alors nous l’avions oublié… »

« Nous n’avions que notre vie, cette petite flamme de ciel sur la terre, délicate et subtile, exposée au souffle d’une époque de fer. »

Les « Neiges Bleues » relatent l’histoire autobiographique de l’auteur, Piotr Bednarski, né en 1934 dans la Pologne envahie par l’armée russe en 1939. Déporté en Sibérie avec les siens, il sera le seul survivant.

De sa mère, on ne connaît, ici, que le surnom, « Beauté », tant sa présence ne laisse indifférent personne jusqu’aux communistes, les rendant, à certains moments, plus humains ; au fil du récit, Petia nous introduit dans la vie de ceux qui l’entourent : Kosykh, le chef de la police, les enfants de la « compagnie », Kolia, l’orphelin à la recherche du visage de ses parents, Sachka, un aviateur mutilé, Pakhomius, le concierge de l’école et « fou de Dieu », grand-mère Anastasia qui ne mâche pas ses mots contre les bolcheviques, pépé Evtouchenko qui, tout en sculptant son cercueil, accueille tous ceux qui passent pour bavarder… Dans cet univers hostile (le froid, la faim, la pauvreté, le système communiste répressif), tout semble conspirer contre la dignité de chaque être humain, qu’il s’agisse des  relégués, des « moins que rien » ou bien des communistes eux-mêmes ; au milieu de tant de haine, de violence et de souffrance, le regard d’un enfant nous fait percevoir la profondeur et la grandeur du cœur humain qui se manifeste dans les joies simples, l’amitié, l’amour, la compassion, la recherche et la confiance en Dieu, le désir de la liberté.

La vie plus forte que la mort, l’amour plus vrai que la haine, voilà le message que, sans aucun doute, l’auteur ose nous partager à travers la bouleversante histoire de son enfance.